A vrai dire, je détestais le mercredi. Il m’irritait. Ma mère avait pris la mauvaise habitude d’inviter sa soeur pour prendre le thé. Un moment de sociabilité qui atteignait des sommets. Petits potins et compagnie étaient de partie. Dans ma chambre, je vivais un enfer. Les cris, leurs rires, leurs coups de gueule. Elles étaient infernales. Deux gamines surexcitées comme une veille de Noël. Mon père avait compris depuis bien longtemps qu’il fallait fuir. Il le faisait, prétextant qu’il avait une réunion avec ces collègues de chasse. Un truc d’hommes. Hmm… Forcément, je ne pouvais pas y aller. Non, ça aurait été trop facile. J’avais le devoir de rester à la maison, tenant compagnie à ma cousine Thora. Je l’aimais, forcément, c’était ma cousine et malgré moi j’avais un grand respect pour ma famille et pour nos valeurs. Une famille sera toujours là, pour le meilleur comme pour le pire. Une amie, un petit ami, un animal n’avaient rien d’aussi éternel. Nous avions le devoir de prendre soin de notre famille et de faire en sorte qu’elle ne s’effrite pas.
Seize heures et trente minutes pétantes. La cloche qui servait de sonnette retentit bruyamment. Je pouvais déjà sentir l'enthousiasme de ma tante rien qu’en entendant le claquement strident du battant contre le fer. Les talons de ma mère provoquèrent de petits sons mélodieux lorsqu’elle marcha sur le parquet. Elle était folle de joie. Pour preuve, elle fredonnait la chanson de la célèbre princesse Blanche-Neige, celle reprise par le monstre Walt Disney, lorsqu’elle se retrouve dans la forêt, entourée d’animaux. Un sourire en chantant.
Elles étaient toutes les trois assises sur le fauteuil. Ma mère, ma tante et ma cousine. Le thé déjà en main pour ce qui concernaient nos mères. Les gâteaux fraîchement sortis du four embaumaient de leurs odeurs gourmandes le salon ainsi que la cuisine. Je profitais du moment où je devais les saluer pour attraper un muffin. J’allais repartir illico dans ma chambre quand les propos de ma mère m'hérissassaient le poil. Un crissement d’ongles sur un tableau noir m’aurait fait le même effet :
- Thora chérie, j’en ai parlé à ta mère la semaine dernière. Nous aimerions vraiment que tu participes à ce concours de beauté qu’organise la ville. Tu es belle, intelligente, surprenante et pleine de ressources. Il y a de grandes chances que tu gagnes haut la main et puis, ce serait l’occasion idéale de te faire remarquer. Peut être pour dégoter un petit contrat dans le milieu de la mode ou bien d’avoir une promotion dans ton travail ? Ce n'est pas ce que tu veux ?
La mine défigurée, je regardais ma cousine avec le regard le plus assassin que je n’ai jamais pu faire dans ma vie. C’était une blague ? Parce qu’elle était vraiment de mauvais goût. Je n’avais aucune envie que ma cousine s’engloutisse dans ce genre de conneries. Pas question qu’elle devienne l’une de ces poupées écervelées.
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Sujet: Re: Family home : tea time - THE COUSINS MOEN Sam 26 Oct - 21:10
family home : tea time
« Thora, si tu ne te dépêches pas, on va être en retard ! » Tu te regardes une dernière fois dans la glace, tu vérifies qu'aucun cheveux rebelle ne dépasse de ton épaisse tignasse. Tu enlèves une petite poussière sur ta chemise bleu foncé. Tu sais que tu ne pourras jamais être parfaite ; tu fais simplement tout pour en approcher. Même si tu as conscience que jamais tu ne pourras atteindre l'idéal que tu t'es fixé. Tu n'es pas destinée à être une belle femme. Et tu maudis le jour où il en a été décidé ainsi. « Oui, oui j'arrive ! » Ta voix est légère et aiguë. Elle sonne horriblement faux à tes oreilles. Tu sors de ta chambre et descends à toute vitesse les escaliers. Tu attrapes ta paire de mocassins que tu enfiles sur la dernière marche de l'escalier. Puis tu passes ton manteau marron et te voilà prête à affronter le monde extérieur. Ta mère t'attend sur le pas de la porte, les clés de la voiture dans une main, l'autre est posée sur sa hanche. Position typique de la mère qui attend. Tu te plantes devant elle et sortez l'une derrière l'autre du joli duplex qui vous sert de demeure.
Dans la voiture, tu te sens un peu stressée. Depuis quelques années déjà, tu as arrêté d'apprécier les visites chez Hanna, la soeur de ta mère. En fait, c'est la présence de sa fille, Helle, qui te déstabilise. Tu n'as rien contre ta cousine, au contraire, tu tiens beaucoup à elle. Vous avez passé votre enfance ensemble ; elle était une des seules amies que tu avais. Mais maintenant tout a changé. Helle est devenue... comment dire ? Sauvage. Tu sais qu'elle n'aime pas la personne que tu es devenue. D'un côté, tu la comprends. Mais tu ne peux t'empêcher de te sentir menacée par ses remarques, ses regards et sa simple présence. Tu es aussi terriblement jalouse d'elle. Tu es petite, ronde, maladroite et tu n'oses même pas être qui tu es vraiment. Alors qu'elle est belle, mince, élégante et elle assume complètement ses idéologies et son monde de vie. Tu es plus âgée qu'elle mais pourtant tu la prends un peu pour ton modèle. Qu'est-ce que tu ne donnerais pas pour être comme elle ?
Te voilà à présent assise sur le fauteuil trônant dans leur spacieux salon. Ta mère et ta tante ont déjà engagé la conversation. Au début, tu n'écoutes pas ; tu te contentes de fixer le plateau de muffin posé sur la table. « Thora chérie, j’en ai parlé à ta mère la semaine dernière. Nous aimerions vraiment que tu participes à ce concours de beauté qu’organise la ville. Tu es belle, intelligente, surprenante et pleine de ressources. Il y a de grandes chances que tu gagnes haut la main et puis, ce serait l’occasion idéale de te faire remarquer. Peut être pour dégoter un petit contrat dans le milieu de la mode ou bien d’avoir une promotion dans ton travail ? Ce n'est pas ce que tu veux ? » A ce moment précis, tu lèves la tête. Ton regard ne croise pas celui de ta mère, ou celui d'Hanna. Non, il croise celui d'Helle qui te jette un regard noir. Tu la détestes quand elle fait ça. Pourquoi se permet-elle de te juger ainsi ? Tu aimerais trouver la bonne réponse ; celle qui satisfera ta cousine. Tu sens tous les regards posés sur toi ; elles attendent que tu prennes la parole.
- Je ne suis pas sûre de vouloir travailler dans la mode. Mon boulot à l'observatoire me plaît bien. Et puis... il y a des filles beaucoup plus jolies que moi à Reine. Je n'aurai aucune chance de gagner.
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