I dive into the darkest sea and sharks are dancing around me ♫
« On ne peut absoudre celui qui ne se repent pas. »«
LANCASTER ! » Mécaniquement, l'interpellé avança d'un pas. Les chaînes à ses chevilles cliquetèrent doucement avant de s'immobiliser, quelque temps après leur propriétaire.
Dix ans. Dix ans que ce bruit lui était familier, qu'il pouvait prédire à la demi-seconde près l'arrêt du son des menottes qui se mettent en place. Dix ans qu'il entendait le claquement régulier des scandales des prisonniers contre le carrelage visqueux. Dix ans que le orange était la seule touche de couleur qu'il pouvait voir dans son champ de vision. Dix ans qu'il régnait ici comme un roi sur le trône. Maître incontesté d'un royaume de criminels. De tueurs. De violeurs. De pédophiles.
Chacun son rôle, dans cette hiérarchie atypique. Lui tout en haut, les tueurs et violeurs d'enfant tout en bas. Il avait très vite apprit les codes et les limites de cet environnement hostile. Victime d'un père violent et abusif, il avait été relativement bien accueilli dans le clan des prisonniers. Quelque part, il avait su gagner honneur et respect, en tuant son bourreau, en éliminant de la surface de la terre un être abominable.
«
Ta peine touche à son terme. Tu seras libre la semaine prochaine. » Il resta silencieux et impavide, peu concerné par la nouvelle.
Libre. La liberté était une des plus belles utopies humaines. Personne n'était libre. Aucun Homme n'avait ce luxe, ici-bas. Tous inférieurs à quelque chose ou quelqu'un, ils aspiraient vivement à cette liberté que l'humanité s'obstinait encore à brandir comme un étendard protecteur. Mais l'argent dominait le monde. L'argent achetait toutes les faveurs, effaçait tous les torts, cachait tous les vices. L'argent procurait le pouvoir, la reconnaissance et la gloire. Il se souvenait d'une citation rabâchée pendant des années par toutes les âmes bien pensantes de sa ville « L'argent ne fait pas le bonheur ». Foutaises.
«
AU SUIVANT ! » Aussitôt, il recula pour reprendre sa place initiale, attendant que le cliquetis des menottes stoppe pour replonger dans ses pensées.
---------------- FLASH BACK ---------------- Il venait d'avoir quatorze ans et un nouveau tatouage. Une croix celtique entre les omoplates, jolie et relativement discrète. Il savait que son père détestait les peaux encrées. Mais il avait apprit à s'en foutre. C'était la cinquième fois qu'il se faisait tatouer, depuis qu'il avait volé l'argent pour se faire marquer «
sons of anarchy » sur le bras gauche. Ce soir là, il sortait de la douche lorsque son père est entré dans la salle de bain, une bière à la main et la clope au bec. Ombre décharnée d'un routier alcoolique et accro au crack, avec une barbe jaunâtre et des cheveux gras tirant très fort sur le gris. De petits yeux de porcin cruel, une bouche édentée et empestant ce mélange atroce du café, du tabac, de l'alcool et de mort. Baldur s'était rapidement retourné pour lui faire face, voulant dissimuler son nouveau tatouage à la vue de son père. Mais le mal était fait. Le fracas d'une bouteille en verre s'éclatant contre le carrelage de la salle de bain résonna et l'instant d'après, Baldur suivait le même chemin. Sa tête heurta le lavabo en mauvaise porcelaine et il manqua de perdre connaissance sous la violence du choc. Une douleur sourde ravagea son crâne mais il entendit son père gueuler «
SALE PETIT CON. JE T'AVAIS INTERDIT ! JE T'AVAIS INTERDIT LES TATOUAGES. C'EST POUR LES CHIENS. » Une nouvelle douleur dans ses côtes apprit à Baldur que son père venait de lui donner un coup de pied. Un gémissement lui échappa, involontaire, qu'il regretta aussitôt. Il ne voulait pas sembler faible. Jamais. Surtout pas devant cet homme qu'il haïssait tellement. «
TU VEUX ÊTRE UN CHIEN ? ATTENDS UN PEU. JE VAIS T'APPRENDRE. » Un signal d'alarme résonna dans son crâne, se mêlant à la douleur. Il aurait voulu protester, se relever, s'enfuir. Mais il n'arrivait plus à bouger, trop engourdi par la commotion. Le carrelage froid lui mordait la joue, paralysant un peu plus sa lucidité. Ce n'est qu'en sentant son père s'installer à califourchon sur lui qu'il comprit. Mû par un instinct terrible, il tenta de bouger, de se redresser. Mais la main de son père vint s'appuyer sur son crâne, le maintenant au sol avec une force propre aux alcooliques. Sachant que c'était sa seule chance d'échapper à un nouveau supplice, Baldur força quand même. Jusqu'à ce que son père lui éclate la tronche sur le carrelage, lui permettant sans le savoir d'échapper à une torture insupportable.
---------------- END FLASH BACK ---------------- «
Tu sais ... ça ne sera pas pareil, sans toi. » Baldur grogna et obligea son interlocuteur à se concentrer sur sa tache. Il détestait la tournure que prenait la discussion. Conscient de ça, le jeune homme brun que Baldur avait prit sous son aile reprit la fellation. A genoux devant les cuisses écartées de son mentor, il s'appliqua à l'apaiser et le satisfaire. Rassuré, le Lancaster se détendit un peu. Il partait dans trois jours et il avait bien l'intention de profiter de ses derniers instants pour baiser. En prison, il n'y avait que des hommes et il avait très vite apprit à s'en contenter. Les formes féminines lui manquaient pourtant, les courbes gracieuses, les seins ronds et fermes, l'entrejambe moite et intime, protégée d'une toison bouclée ... L'odeur suave des parfums pour fille, les reins cambrés, les vagins étroits et chaleureux ... Les souvenirs se mêlant aux fantasmes, secondés par les coups de langue adroit de son jeune protégé, il ne tarda pas à jouir. Sans prévenir. Il éjacula dans la bouche de son jeune partenaire et esquissa un sourire amusé avant d'obliger ce dernier à se redresser, fermant ses doigts puissants autour de sa mâchoire délicate. «
Avale » ordonna-t-il d'un ton brusque. Indécis, le jeune homme répondant au doux nom de Fergus plongea ses yeux noisettes dans l'océan sauvage de ceux de Baldur. Agacé, ce dernier ferma un peu plus fort les doigts autour du menton de Fergus et répéta l'ordre. Finalement, le jeune homme obtempéra. A contre-coeur, mais sans protester ouvertement.
Pas très grand, tout menu, à peine musclé, il possédait un visage presque féminin, gracieux et délicat, des cheveux bruns en bataille, encore humide de la douche qu'il venait de quitter. Des yeux noisettes assez ordinaires, sans charme particulier. Mais c'était une proie facile et Baldur avait très vite su, en le voyant débarquer dans la prison, qu'il ne ferait pas long feu sans protection. Alors il s'en était occupé, moyennant quelques faveurs sexuelles en échange. Trop heureux, Fergus avait accepté sans se faire prier et se coulait désormais des jours tranquilles, à l'abris des coups et des mauvaises surprises.
/!\ VIOLENCE/SEXE /!\«
Tourne toi. » Fergus ne se le fit pas répéter cette fois et prit appui contre les bords du lavabo voisin de celui sur lequel Baldur était assis, offrant son cul au premier venu. Le Lancaster prit un instant pour apprécier son pouvoir, détaillant le corps nerveux et sans muscle de son partenaire avant de sauter sur le carrelage, se bralant vigoureusement pour se remettre en condition. Il songea aux femmes, à leur chaleur agréable, aux tétons tendus sur des seins énormes, aux vagins qui n'attendaient plus qu'une bite, les miaulements et les cris de plaisir ... Il ne lui fallut pas très longtemps pour que son sexe réagisse, électrisé par tous ces fantasmes. «
Tu vas me manquer, quand tu ne seras plus là. » Baldur grogna et pénétra de force dans le cul de Fergus, voulant couper court à toutes ces niaiseries sentimentales qu'il avait en horreur. Un gémissement de douleur passa les lèvres du jeune brun mais Baldur s'en foutait comme de sa première pute. Rapidement, il adopta un rythme rapide et soutenu, assénant des assauts sales et virils, bestiaux. «
Je ne vais ... aaaah ... je ne ... ha. ha. Qui prendra soin ... ah ! De moi ? » Baldur ne répondit pas, profondément énervé par les bavardages de son partenaire. Voulant le faire taire, il tendit une main pour aller lui fourrer les doigts dans la bouche, l'obligeant à sucer. Ce fut efficace jusqu'à ce que Fergus vienne à manquer de souffle, repoussant la main du grand blond pour respirer un peu, reprenant alors où il s'était arrêté. «
Tu étais ... ah. Ah. Aïe. Ah ... Le seul ... ah. Ah. AAAAH. A prendre soin de .... Eh. Oh. De moi ... » Cette fois, en colère, Baldur se retira et tira Fergus par les cheveux pour aller le plaquer contre la paroi carrelée d'une douche. «
Ta gueule où je te défonce l'anus au point que tu ne pourras plus rien en faire. Ta gueule. » Surpris et effrayé, Fergus hocha vigoureusement la tête. Satisfait, Baldur pénétra de nouveau dans le cul de son partenaire afin de finir ce qu'il avait commencé. Sans douceur aucune, il baisa violemment le jeune homme brun, se vengeant un peu avant de jouir une nouvelle fois et de se retirer brutalement. Satisfait, il tourna le robinet et se doucha rapidement avant de s'envelopper dans une serviette.
FIN DE LA PARTIE VIOLENCE/SEXE Sur le point de quitter les douches, il lança sans se retourner «
J'ai déjà donné des instructions pour ta sécurité. T'es tranquille. » Il disparut juste après, retournant s'habiller sans plus se soucier de son protégé. Ou ancien protégé.
« Un diable ne fait pas l’enfer. »Souvenirs. Images altérées d'une réalité achevée. Terminée. Souvenirs. Tableaux évanescents et flous qui hantent même les gens les plus irréprochables, lourd fardeau à porter. En coupant le puissant moteur de sa vieille Harley Davidson, Baldur contempla la maison paternelle d'un air sombre.
L'endroit tombait en ruine. Le crépit se détachait du mur craquelé, fissuré et d'un béton uniformément gris sous une couleur qui, autrefois, avait du être terre de sienne. Les fenêtres couvertes de poussière accusaient l'âge et le manque d'entretien, il était impossible de discerner quoi que ce soit à travers. La vieille porte en bois sombre, efflanquée d'un cadre peint en blanc mais qui tirait sur le gris cendre, était précédée d'une volée de marche en béton armé, sur lesquelles une végétation hostile et sauvage prenait tranquillement ses aises. Le petit morceau de terrain qui séparait la clôture en fer de la vieille bâtisse s'était transformé en une petite jungle autonome où l'on pouvait trouver toutes les mauvaises herbes du pays.
D'un coup de pied brusque, il ouvrit le petit portail branlant qui céda sous la poussée et tomba à plat dans la poussière sèche de l'allée menant au garage. Baldur le repoussa du bout de sa botte afin de dégager le passage pour sa bécane, allant la déposer devant la porte métallique du garage. Presque admiratif, il observa un moment les taggs qui s’accumulaient sur le rideau de fer rouillé avant de caler sa moto sur sa béquille et d'aller donner un tour de clef afin d'ouvrir l'endroit. Une odeur âcre le fit tousser un peu, mélange de poussière et de produits nocifs, huile de vidange, liquide de dégivrage, essence ... Autant d'effluve qui faisait remonter chez lui des élans de dégoût. Cet endroit, il s'y réfugiait quand il voulait échapper à son père. Cachette d'un gamin trop lâche, trop effrayé à l'idée d'affronter son père. Haussant les épaules, il laissa l'endroit s'aérer un peu avant de contourner la maison pour vérifier la cabane à outils en taules et en planches mal assemblées que son père avait construit pour y cultiver son addiction. Au milieu d'une végétation laissée en friche, le taudis se dressait là, encore debout malgré son allure insalubre et bancale. Il y reviendrait plus tard.
Retournant sur le devant de la maison, il jeta un coup d'oeil dans le garage et haussa les épaules d'un air indifférent. Il lui faudrait ranger un peu, jeter des trucs et réorganiser l'espace mais il pouvait y aménager un endroit pour sa bécane et pour la voiture qu'il comptait s'acheter plus tard. Il ne roulait pas sur l'or mais son père avait eu la décence de lui laisser un petit héritage auquel il n'avait pas touché. Il avait réellement tout gagné, en tuant son paternel. Un sourire satisfait effleura les lèvres du Lancaster et il grimpa alors les quelques marches qui faisaient office de perron, ouvrant enfin la porte de la maison paternelle.
---------------- ONE YEAR LATER ---------------- «
Yo, Lancaster ! C'est fini pour aujourd'hui, bouge ton cul de mon garage. Je ferme. » Baldur fit glisser sa planche à roulette afin de quitter les dessous complexes de la petite voiture de sport qu'il était en train de réparer. Se redressant à la seule force de ses abdominaux, il lança sur le même ton «
Ouais, je m'arrache. Mec, demain j'veux mon chèque. Déconne pas hein. » Le propriétaire du garage mit un certain temps à répondre, du fond de son bureau «
Ouais ouais, tu l'auras demain, je fais les comptes ce soir. Maintenant, dégage de là. » Baldur se releva avec une souplesse déplacée chez un mec de sa tempe. Grand, très large d'épaule, musclé comme un voyou et le visage couvert d'une belle barbe blonde, il faisait un peu penser à un barbare nordique. Un viking égaré. Ses tatouages et ses longs cheveux blonds accentuaient le trait, faisant de lui un cliché ambulant. L'occasion pour tous ceux qui s'y frottaient de vérifier que les stéréotypes étaient parfois fondés. Les mains noires de crasse, la combinaison couvert de cambouis et d'huile de moteur, il s'approcha du capot du véhicule et le ferma d'un geste sec avant de laisser tomber ses outils dans le bac prévu à cet effet.
Dix minutes plus tard, en jean pourri et en sweat usé sous sa veste en cuir, il enfourchait sa moto et prenait le chemin de chez lui.
«
Putain gamin, je t'ai déjà dit d'pas débarquer comme ça chez moi » Baldur jeta son blouson de cuir sur le dossier de son fauteuil favori avant de gagner la cuisine. Ouvrant le frigo d'un geste brusque, il attrapa une bière avant d'ébouriffer un peu fort les cheveux du gosse qui squattait chez lui. «
Tu fais chier hein. T'écoute jamais rien. » Il insista un peu, décoiffant totalement le jeune homme avant d'aller s'écrouler dans son fauteuil, allumant la télévision dans l'espoir de saisir la fin du match de hockey.
Il avait fait faire quelques travaux, dans la maison, grâce à l'héritage de son père. Désormais, l'endroit était propre, fonctionnel et habitable. Loin d'être luxueux mais déjà bien plus salubre et viable que à l'époque où son père vivait là. Il avait fait refaire la salle de bain, ne supportant plus le carrelage brisé qui lui rappelait de mauvais souvenirs. Il avait aussi entièrement fait refaire l'étage, avec sa chambre et celle que son père avait autrefois occupé. La cuisine était restée à peu près la même, il ne s'en servait presque jamais de toute façon et le salon avait subi quelques changements mineurs. Juste de quoi se sentir un peu chez lui et non plus chez son père.
«
Yo, gamin. Tu veux une bière ? Sers toi et vient regarder le match, puisque t'es là. » Il avait mit du temps à s'habituer à la présence de ce jeune adolescent brun aux yeux bleus, le fils du type d'en face, un mec qu'il haïssait avec une violence meurtrière. Il savait ce qui se passait, lorsque le père pétait les plombs, ravagé par une maladie étrange et dérangeante. Le gamin en prenait cher pour son grade et ça le rendait fou mais il avait décidé d'arrêter de poser des questions, d'essayer de faire parler le gamin. La relation entre le gosse et son paternel le dépassait trop pour qu'il cherche à s'en mêler. A la place, il se contentait d'offrir l'asile au gosse. Aryan, de son prénom. Un drôle d'oiseau, à la fois mignon et triste, pas très grand, pas très beau ... Aryan avait prit l'habitude d'aller et de venir comme si c'était ici chez lui. Au départ, Baldur avait grogné, virant le gamin sans ménagement. Mais à force, il s'y était fait et il en venait parfois à apprécier sa compagnie.
Sauf quand le gosse se mettait en tête de l'approcher trop près. Il devenait violent et agressif, lorsque Aryan tentait de le toucher, de se glisser entre ses cuisses pour le sucer. C'était sale et malsain, il ne voulait pas être comme le père du gosse, comme ce type qui abusait de son fils dans ses éclats de rage. Il ne voulait pas être son propre père, qui abusait de lui pour le punir et lui faire payer son existence.
Plusieurs fois, Aryan avait essayé pourtant. Il avait déjà pu tester la persévérance du gosse, lorsqu'il l'avait jeté dehors au début de leur relation étrange. Le gamin continuait de revenir, toujours. Et toujours, il tentait de se glisser sur les genoux de Baldur, de s'agenouiller devant lui, de le déshabiller. Toujours, il finissait sur le sol, repoussé sans douceur par le grand blond qui ne voulait pas de ça.
Pourtant, le soir dans son lit, Baldur se prenait à rêver de ce gamin, de sa gueule d'ange et de ses yeux bleus. Il lui arrivait même de se masturber en y pensant. La bouche rosée du gosse autour de son sexe, la langue humide contre sa peau, les mains sur ses cuisses ... ça le faisait jouir très vite et il s'endormait ensuite comme un bienheureux, ayant tout oublié au réveil.